« Le baccalauréat n’est plus ce qu’il était. » Cette phrase pourrait sembler exagérée pour certains, mais force est de constater que, dans le contexte actuel, le Bac a perdu une partie de son rôle initial en tant que sésame vers l’avenir académique. Avec l’instauration de Parcoursup, la plateforme d’admission dans l’enseignement supérieur, l’importance du baccalauréat a été redéfinie. Jadis rite de passage redouté et décisif, le Bac semble aujourd’hui relégué au rang de simple formalité. À qui la faute ? Peut-être à une orientation qui s’opère désormais… avant même l’examen.
Une réforme aux effets inattendus
Depuis la réforme du Bac en 2019, les cartes ont été rebattues :
- 40 % des notes proviennent du contrôle continu,
- Parcoursup formule ses premières réponses avant les épreuves finales,
- Le taux de réussite frôle les 96 %, avec une majorité de mentions.
Résultat : la « grande épreuve » a perdu son pouvoir de sélection. Le stress s’efface, la pression aussi. Mais faut-il s’en réjouir ?
En effet, avec la réforme du Bac, la logique de sélection qui définissait le diplôme semble avoir été mise à mal. Le contrôle continu a pris une place prépondérante, réduisant l’impact des épreuves finales. Si cette approche favorise une évaluation plus régulière, elle affaiblit en même temps le rôle du Bac en tant que moment charnière du parcours scolaire. Au lieu de se concentrer sur la finalité, les élèves semblent désormais plus préoccupés par la gestion du contrôle continu que par la préparation à un examen final.
Une perte de repères pédagogiques
Le Bac n’était pas qu’un diplôme. Il structurait l’année scolaire, donnait un horizon, cristallisait les efforts. Aujourd’hui, l’attention des élèves se détourne :
- Certains relativisent son importance,
- D’autres ne comprennent plus son rôle.
On révise moins. On prend moins au sérieux les épreuves. Et dans cette zone grise, les comportements changent : on reporte, on abandonne, on se désengage.
Ce qui était auparavant une étape incontournable et fondatrice de l’année scolaire s’efface peu à peu. Sans le défi du Bac, les élèves semblent perdre la motivation de se concentrer sur des révisions sérieuses, et les efforts semblent dilués. Le manque de repères clairs dans le système crée un vide, qui se traduit par un désengagement croissant et un recul de l’esprit de compétition nécessaire pour atteindre l’excellence.
Parcoursup : progrès ou fracture ?
Parcoursup répond à une logique d’efficacité : anticiper les admissions, fluidifier les flux. Mais en plaçant l’évaluation avant la fin de l’année, elle fragilise le dernier jalon scolaire. Ce système renforce certaines inégalités :
- Les lycées plus exigeants pénalisent leurs élèves,
- Ceux qui ont besoin de temps pour progresser se trouvent figés par leurs notes de 1ère et de Terminale.
Si Parcoursup permet de rationaliser le processus d’admission dans l’enseignement supérieur, il met en lumière des failles : l’inégalité des chances entre élèves des établissements plus ou moins exigeants, et l’impact des premières notes de l’année sur des parcours qui ne sont pas encore achevés. Cela prive certains élèves d’une seconde chance de briller au Bac et les fige dans un système qui ne valorise plus leur évolution sur l’ensemble de leur parcours.
Quel rôle pour les accompagnateurs éducatifs ?
Dans ce contexte, les tuteurs scolaires et les accompagnateurs éducatifs deviennent essentiels. Pourquoi ?
- Ils redonnent du sens à l’effort scolaire, même sans enjeu immédiat.
- Ils aident à se projeter au-delà de la note, vers la maîtrise réelle.
- Ils encouragent une discipline personnelle, là où le système n’impose plus de calendrier clair.
Les accompagnateurs jouent un rôle crucial en réinstaurant une forme d’exigence et de suivi personnalisé. Tandis que le Bac a perdu une partie de son importance, le tutorat scolaire renforce la nécessité de rester concentré sur l’acquisition de compétences réelles, non seulement pour réussir des examens, mais pour se préparer à la vie professionnelle. En remettant le sens de l’effort et en encourageant l’autonomie des élèves, les tuteurs sont des piliers dans cette ère de réforme du système éducatif.
En conclusion …
Ce n’est pas le Bac qu’il faut sauver, c’est ce qu’il représentait : une occasion d’apprendre à se dépasser. Aujourd’hui, alors que les repères externes se diluent, il est plus que jamais nécessaire de réinstaurer des repères internes. Et cela commence par un accompagnement humain, exigeant, bienveillant et lucide. Si le Bac n’est plus l’épreuve ultime, l’école doit redonner du sens à l’effort personnel et à la quête de l’excellence. Les élèves doivent apprendre à se dépasser, indépendamment de la note finale ou du diplôme, en développant une véritable autonomie dans leur apprentissage.
Ainsi, la solution ne réside pas dans la réhabilitation du Bac lui-même, mais dans la construction de nouveaux repères plus adaptés à l’évolution des parcours scolaires et à l’aspiration d’un apprentissage véritablement autonome.